Parole d’entrepreneure : Inès Cherifi, déléguée externe à la protection des données personnelles
J’ai 30 ans et après avoir été juriste en droit des affaires dans l’industrie, je me suis mise à mon compte au printemps 2021 pour devenir consultante RGPD. Je me suis donc spécialisée dans le Règlement européen à la Protection des Données, qui aide les entreprises à prendre soin des données personnelles qu’un humain leur confie.
Lorsque que j’étais juriste, j’ai travaillé avec des directrices et des responsables juridiques qui avaient à coeur de créer des relations contractuelles justes et équilibrées avec nos partenaires commerciaux. Quand le RGPD est arrivé, j’y ai vu l’occasion de poursuivre dans cette voie, à savoir faire de l’éthique des affaires en prenant soin des données personnelles de ses clients, salariés ou encore partenaires.
Aujourd’hui, je me sens complètement à ma place dans mon métier. J’envisage le RGPD comme un outil, une série de questions qui permettent de savoir comment tu utilises une donnée personnelle qu’on te confie, pourquoi tu l’utilises, à qui tu la mets à disposition et où tu la stockes. La finalité de ces questions, c’est de comprendre comment on fonctionne pour améliorer son fonctionnement et savoir l’expliquer. Une fois que tu as compris ton fonctionnement tu peux mettre en place un plan d’action pour apporter des corrections nécessaires quand il y en a besoin. Même si au premier abord, le RGPD peut ne pas sembler sexy, j’y vois un outil pour créer une relation de confiance entre une entreprise et l’humain qui lui confie sa donnée et donc pour participer au triptyque confiance – sincérité – transparence qui est pour moi la clé d’un business éthique.
J’ai commencé l’entrepreneuriat lorsque mon contrat de juriste en droit des affaires a pris fin. En période Covid, il était compliqué de retrouver un emploi. En étant freelance, j’ai très vite constaté que j’étais perçue comme un investissement et non comme une ressource. C’est un positionnement qui change tout car on est tout de suite plus écouté. Avec ce statut, j’offrais en outre de la flexibilité à des entreprises qui n’auraient pas pu embaucher un Délégué à la Protection des Données à plein temps. C’est pourquoi cette expérience d’indépendant, que j’envisageais au départ comme une transition entre deux CDI s’est imposée à moi comme quelque chose de durable.
– J’aime le fait de pouvoir être moi-même, de pouvoir parler avec ma propre voix et incarner mes propres valeurs. J’ai toujours voulu créer des relations de confiance autour de moi et être sincère avec les autres à la fois dans ma vie professionnelle et personnelle. J’aime aussi le fait de rendre les choses accessibles et de casser cette image un peu rigide du juridique.
– J’aime également donner vie à des idées. Dans les grosses industries, c’est beaucoup plus difficile de les faire passer et de les mettre en place sur du court terme. Il faut convaincre la direction, le management, cela prend du temps. Je pense qu’on peut avancer plus vite en étant entrepreneur et rendre son idée visible à d’autres plus rapidement.
– Enfin, j’aime les discussions et les échanges profonds que je peux avoir avec mes différents interlocuteurs que ce soient des clients ou des entrepreneurs comme moi.
La solitude dans ma vision !
Je me sens vraiment en décalage avec mes proches. Etant entourée de proches non entrepreneurs, ils ne mesurent pas l’intensité de ce que je vis au quotidien, l’investissement émotionnel, ni le chemin qu’il me reste à parcourir pour construire mon entreprise de manière pérenne. Et c’est aussi cela qui renforce ma solitude.
Pour lutter contre ce sentiment de solitude, je travaille énormément mon mindset, Je me suis fait accompagner par plusieurs coachs (un coach mindset et un coach business), je lis beaucoup de livres qui m’inspirent, et suis des comptes sur les réseaux sociaux qui parlent d’entrepreneuriat notamment. En 2022, grâce à internet, on est à un clic de la connaissance et c’est une chance inouïe.
Je m’entoure également d’autres entrepreneurs qui comprennent ce que je vis et qui peuvent m’inspirer.
Grâce à cela, lorsque je doute, je reviens toujours aux raisons profondes pour lesquelles je me suis lancée dans cette activité et, généralement, ça marche !
Mon modèle économique repose sur deux sources de revenus :
- Des revenus actifs, pour lesquels je fais de la production directe en individuel pour mes clients. Ces revenus sont limités car je me suis fixé un nombre d’heures mensuel de 112 h, soit environ 4 jours par semaine de travail consacré à mes clients. Je veux garder du temps pour mon écologie personnelle.
- Des revenus passifs, issus de produits qui se vendent seuls, et qui viennent compléter mes revenus actifs. Ainsi, par exemple, je capitalise sur mon réseau en créant des partenariats avec des métiers qui sont cohérents et qui vont pouvoir servir et aider mon client. Ces partenaires peuvent être des prestataires en cybersécurité, des éditeurs de logiciels qui accompagnent la mise en conformité du RGPD ou encore des cabinets de conseils experts RGPD… Je développe également de la création de contenus sur les réseaux sociaux, en étant convaincue qu’à long terme, cela deviendra une source de revenus complémentaire. J’ai donc créé une chaîne YouTube et un compte Instagram qui s’appellent Madame RGPD où je délivre toutes mes connaissances de façon simple et accessible.
Au-delà de l’aspect financier, j’aime bien parler de « stratégie d’envahissement ». Mon objectif étant d’aider au sens large les humains et citoyens pour prendre conscience de l’importance du RGPD, je souhaite être reconnue à terme dans l’esprit des gens comme « Madame RGDP », proche, sympathique et accessible.
Ma vision de la réussite ne se mesure pas, selon moi, au nombre de filiales et de salariés. Je souhaite m’entourer d’un écosystème de partenaires qui veulent incarner et défendre la même vision du RGPD et partager les valeurs de sincérité – confiance – transparence pour aider autour de nous.
Cela ne passe pas par l’embauche de salariés. J’ai besoin de m’entourer de gens qui sont motivés par l’envie et non pas seulement par le côté sécurisant d’un emploi.
Travaille ton mindset.
Etre un bon exécutant et un bon dirigeant sont deux choses différentes. J’encourage les personnes à se poser d’abord les bonnes questions. Pour être un bon dirigeant, il faut savoir développer son état d’esprit entrepreneurial,savoir rester dans son idée même quand ton entourage pensera différemment de toi.
Nous remercions Inès pour cet entretien et vous invitons à la suivre sur son site, sa chaîne YouTube, son compte Instagram et son profil Linkedin.