Parole d’entrepreneure : Emilie Lebrun, co-fondatrice et dirigeante de Whodunit

Parole d’entrepreneure : Emilie Lebrun, co-fondatrice et dirigeante de Whodunit

Peux-tu te présenter et nous expliquer en quoi consiste ton activité ? 

 

Je m’appelle Emilie Lebrun et depuis plus de 25 ans, j’ai toujours eu plusieurs casquettes. Aujourd’hui, je suis co-fondatrice et dirigeante de l’agence Whodunit, une agence web spécialisée en création et maintenance de sites WordPress. L’agence présente deux particularités : nos 25 salariés sont en 100% télétravail depuis 2017 et une partie de notre temps de travail n’est pas rémunéré puisqu’elle consiste à contribuer au CMS WordPress, qui est en open source.

 

En parallèle, j’ai une activité de consulting, qui consiste à accompagner des dirigeants d’entreprise – et en l’occurrence de plus en plus de dirigeantes – sur la mise en place d’un environnement salarial / RH similaire à ce que nous avons développé chez Whodunit, mais également sur des problématiques plus générales de trésorerie, de positionnement stratégique, d’acquisition de clients… En fait, j’essaie de leur transmettre ce que j’ai appris de mes expériences. J’ai d’ailleurs lancé depuis l’an dernier un podcast « Smart & geek » sur ces questions.

 

Enfin, je suis très investie (et depuis longtemps) dans l’association lyonnaise « la cuisine du web » qui se veut être un facilitateur et agitateur de l’écosystème numérique notamment lyonnais (mais pas que !), avec un état d’esprit très bienveillant et contributif, qui me rappelle d’ailleurs le principe de la communauté WordPress.

 

Comment es-tu devenue entrepreneure ?

 

Je suis devenue entrepreneure très tôt ! Dès mes premières expériences de salariée, j’ai développé en parallèle une activité entrepreneuriale, d’abord en dépannage informatique, puis en tant que graphiste freelance. C’est d’ailleurs chez l’un de mes clients en tant que freelance que j’ai rencontré mon futur associé, et ensemble nous avons créé l’agence en 2009.

A ses débuts, notre agence correspondait à la vision entrepreneuriale de « mon ancien moi », enfant des années 80 qui rêvait devant les gratte-ciels de la Défense et qui pensait que pour réussir il fallait des beaux bureaux, un grand open space, des horaires de travail à rallonge. Et puis, au fil du temps, et notamment au contact d’autres entreprises de la communauté WordPress, nous nous sommes rendus compte qu’un autre modèle était possible. Nous avons alors évolué vers un modèle et une organisation plus souples et plus agiles. Ainsi, dès 2015, bien avant la Covid qui a généralisé le télétravail, nous avons opté pour le 100% télétravail qui constitue l’ADN de Whodunit aujourd’hui ! Mon quotidien et celui de mes salariés ont complètement changé. J’ai déménagé à Lyon, les salariés ont pris énormément de responsabilités, je délègué énormément, ce qui me laisse du temps pour développer d’autres activités à côté. Notre équipe vit aux quatre coins de la France, ce qui crée une richesse au quotidien juste incroyable.

Le 100% télétravail s’est révélé être un levier de recrutement, notamment pour attirer des développeurs, qui sont une denrée rare ! Cela a également constitué un point de différenciation non négligeable auprès de nos clients qui y ont cette évolution comme une forte capacité de l’agence à innover !  Bien sûr, cela s’est fait de façon progressive et réfléchie. Nous avons mis un an à mettre en œuvre les outils nécessaires pour être efficaces à distance et pour fermer complètement nos bureaux.

 

Qu’est-ce qui te plaît le plus dans le fait d’être entrepreneure ?

 

Avoir la liberté de modeler notre quotidien et celui de nos équipes selon nos propres valeurs (dans le respect des règlementations existantes et du droit du travail bien sûr ;-).

Aujourd’hui, je suis ravie et fière que mes salariés bénéficient de cette liberté et de cette flexibilité dans leur travail. J’adore savoir qu’ils prennent le temps d’aller chercher leurs enfants à l’école, font une pause pour aller faire du sport… Cela montre qu’ils se sentent libres dans leur façon de travailler et, grâce à cela, ils vont d’autant plus s’impliquer pour l’entreprise. La liberté et l’implication forment un très beau cercle vertueux. Cela implique également une grande transparence : dès lors que nous ne sommes pas à côté, nous partageons beaucoup d’information, ce qui permet à chacun de comprendre nos décisions, de s’impliquer, de rebondir. Ainsi, par exemple, la grille salariale est connue de tous, de même que nos dépenses, les augmentations sont du même montant pour tout le monde, et nous veillons à respecter un ratio inférieur à deux entre le haut et le bas de la grille des salaires. Cela crée un terrain très fertile à la confiance, à la croissance, à l’innovation et au bien-être.

Grâce à cette organisation, nous n’avons pas de turn-over, alors que nos équipes pourraient gagner plus chez certains concurrents. Clairement, nos salariés ne recherchent pas qu’une rémunération, mais bien un équilibre global, une liberté, et les conditions que leur offre Whodunit leur conviennent.

 

Quelles sont les principales difficultés auxquelles tu as eu à faire face ? 

 

Le quotidien du chef d’entreprise, c’est de régler des choses qui ne vont pas. Alors je dirais que la première difficulté c’est d’être capable d’avoir du recul, de prendre de la hauteur pour voir au-delà de ce quotidien.

La deuxième difficulté c’est de faire les bons choix, de trouver l’équilibre entre ses convictions et ses valeurs et ce qui est réalisable.

 

Quelle est ta stratégie de développement ?

 

En ce qui concerne l’agence, notre stratégie de développement – et cela peut paraître paradoxal !-, est de veiller à ne pas trop grossir. En effet, nous souhaitons garder une taille raisonnable pour garder l’état d’esprit qui nous est cher, et nous estimons qu’au-delà de 30 salariés, cela ne serait plus possible. Par ailleurs, nous n’envisageons pas notre développement uniquement à l’aune de notre chiffre d’affaires. En revanche, nous identifions les sujets qui nous semblent être importants et sur lesquels nous souhaitons nous développer ou être mieux identifiés. Ainsi, pour les prochains mois, nous souhaitons nous renforcer sur l’éco-conception. Cela pose un certain nombre de questions enthousiasmantes : comment se positionner, quelles compétences devra-t-on acquérir, quelle formation privilégier, avec quels partenaires avancer…

J’ai également à coeur de développer mon activité de consulting/coaching auprès des chefs d’entreprise. Cela me tient beaucoup à cœur car j’aurais tellement aimé, lorsque j’ai commencé à travailler, que quelqu’un me dise que d’autres modèles étaient possibles ! Et je pense que mon expérience me donne une vraie légitimité pour cela

 

Quel conseil pour une personne qui souhaiterait se lancer ?

 

Mon conseil, ce n’est pas de se lancer pour l’argent mais pour la passion de ce qu’on veut faire. Il faut se donner la liberté de créer l’entreprise dans laquelle on a envie d’évoluer !